J’ai projet d’ouvrir les tribunes de l’être. Un tapis de poésie sur la place publique. Car la place de la poésie n’est pas sur les podiums mais dans l’intimité de la foule. Là où la parole bruisse librement. J’ai le souci d’y être aux petits soins de l’âme, et de prétendre que l’âme des choses ne prévaut pas sur l’âme des gens. Je veux donner un corps au lieu du véritable échange. Ce corps ce sera nous. Nous devons pour cela venir munis de ce qui nous anime, de ce qu’il nous importe de dévoiler au vent par nos bouches, de ce qu’il nous importe de porter au cœur par nos oreilles. Nous partagerons ici les plaisirs du langage. Toutes les langues valent d’être dites. Les livres ne sont à mes yeux que des supports transitoires. La véritable place de la parole est dans le cœur des gens. J’aimerais que nous nous redonnions cette dignité.

 J’ai projet d’ouvrir les tribunes de l’être sur la place publique, au milieu de la foule, encore ce samedi au vide grenier du Pré Saint Gervais. J’espère qu’il y fera chaud. Nous y parlerons de sentiments. Ou d’autres choses. J’y invite mes amis poètes, les curieux du langage, les porteurs de paroles et tous ceux qui se sentent concernés par la chose, à venir s’assoir ou se lever avec moi sur ce tapis. Partager le risque d’être entendu, ou de ne pas être entendu. Écouter bruire au milieu de la foule quelques paroles singulières. J’imagine que nous arriverons à nous tenir là avec la simplicité qui convient à la chose, la simplicité des fleurs qui poussent là où le vent les a semées ; partager l’indicible qui sous-tend tout langage. J’espère que la poésie se tiendra là avec le naturel avec lequel elle se tient dans nos vie. Comme une respiration. Que nous parviendrons ce jour là à respirer ensemble un peu plus, un peu mieux. J’espère ouvrir sur notre commune une petite jachère où vienne s’enraciner ce qui se cultive avec modestie avec discrétion et bien souvent dans l’ombre. J’espère que ce samedi la terre du Pré sera porteuse d’une jolie moisson d’espoir.

         Merci.